Par ce procédé, Pissarro nous laisse entrevoir des éléments hors champ, ouvrant ainsi avec audace la perspective du tableau. La toile est composée d'une série de petites touches de couleur compactes et irrégulières, presque illisibles. Ce sont les recherches expérimentales du peintre pour transposer la lumière sur la toile. Ici, tout est couleur; l'artiste n'utilise aucun noir, mais choisit une gamme nuancée d'ocres, de bleus, de gris clairs, de mauves, de verts pour suggérer les quelques traces de gelée encore présentes dans ce paysage. Une absence de pittoresque C'est auprès de Corot que Pissarro découvre le travail en plein air. Depuis, le peintre aime être au plus près du motif qu'il représente. Gelée blanche - Camille Pissarro | Musée d'Orsay. La figure du paysan n'est pas l'élément le plus important de la toile: celle-ci ne raconte effectivement rien, valorisant ainsi sa facture et faisant des jeux d'ombres et de lumière le sujet principal du tableau. D'une recherche de vérité finalement ordinaire, l'artiste sait en faire émerger une puissante perception plastique.
Pissarro est sur ce plan très important, d'autant plus qu'il eut beaucoup d'influence sur certains peintres notamment Cézanne et Gauguin. Gelée blanche étonna par le choix du sujet un endroit de campagne presque vide, et par la manière dont il est traité. Un chemin de campagne au milieu des champs, un paysan chargé d'un fagot remonte ce chemin, c'est l'hiver, la campagne est couverte de givre, quelques arbres fruitiers de part et d'autre de cette voie, il s'agit de la route d'Ennery près de Pontoise, deux meules à l'horizon. Camille Pissarro, La Gele blanche : tableau de et peinture de Pissarro. Composition La terre occupe une partie majeure du tableau; une très belle ligne descendante et creusée vers le centre fait l'horizon, comme la vue est au bas du coteau, et donc qu'elle est en contre- plongée (selon le terme de la grammaire cinématographique), cet horizon est proche. Une grande diagonale traverse le tableau de gauche à droite, celle du chemin qui s'arrête sur la ligne d'horizon de part et d'autre des champs très élégamment disposés en ailes d'oiseau.
Gaston Lévy, qui réside alors à l'étranger, ne fait pas de réclamation après la guerre auprès de la commission de récupération artistique; en revanche, il présente une revendication auprès des autorités allemandes en 1962 dans le cadre de la loi BRÜG (4); le Pissarro et le Signac figurent dans la liste des oeuvres de sa réclamation, suggérant que Gaston Lévy ne les avait pas récupérés alors. En 1988, le Pissarro et le Signac réapparaissent et sont saisis le 23 avril par les douanes françaises alors qu'ils étaient exportés frauduleusement sans autorisation de sortie de territoire. Ils sont alors la propriété de la société Niconique qui tentait de les exporter en Belgique; cette société appartient à un ressortissant né en Lithuanie. Pissarro gelée blanche porte. Celui-ci tente de récupérer les oeuvres mais, après épuisement des actions contentieuses, celles-ci sont saisies puis intégrées aux collections nationales françaises en 2000 et attribuées au musée d'Orsay. Le tableau de Pissarro est inscrit sous le numéro d'inventaire RF 2000 83.