Le Secrétaire général de l'Office National des Hydrocarbures et des Mines (ONHYM), Abdellah Moutaqui, a accordé un entretien à la MAP, dans lequel il aborde l'état des lieux du secteur minier au Maroc et la mise en œuvre du plan minier. Il met également l'accent sur le développement de l'attractivité et la compétitivité du secteur minier et l'apport du modèle minier marocain pour le continent africain. 1- Quel est l'état des lieux du secteur minier au Maroc? Avec des impacts positifs à trois niveaux, national, régional et local, le secteur minier est un contributeur important dans le développement socio-économique du pays. Sa part dans le PIB est estimée à 10% et le nombre d'emplois directs est d'environ 40 000. En termes d'exportations, le secteur contribue à hauteur de 80% en volume et 20% en valeur. La production dépasse 38 millions de tonnes, dont 35 millions de tonnes de phosphate et environ 3 millions de tonnes pour les autres produits (Argent, cobalt, plomb, zinc, cuivre, manganèse, barytine, bentonite, sel gemme, fluorine, fer, argiles, talc …).
D'où la promulgation d'une loi qui s'inscrit parmi les reformes et mesures prises pour rehausser les performances du secteur minier et assurer une attractivité des investissements nationaux et étrangers. En ce qui concerne la cartographie géologique, le département de l'Energie et des Mines est actuellement doté d'une Direction centrale s'occupant de la géologie (Service géologique National). Ceci est justifié par le fait que le Maroc aspire à booster le secteur minier et celui de l'exploration pétrolière et gazière et se doit logiquement de disposer d'une structure performante à même de rattraper le retard du programme de cartographie géologique qui ne dépasse pas aujourd'hui les taux de couverture suivants: 36% en cartes géologiques; 42% en cartes géophysiques; 8% en cartes géochimiques. Une feuille de route est actuellement mise en place, déclinant la vision 2015-2025 en projets cartographiques concrets et prioritaire. Le but recherché est d'accélérer le rythme de la production cartographique pour rattraper le retard cumulé au fil des années en matière de cartographie géologique, outil incontournable pour la connaissance des potentialités minières que recèlent le sol et le sous-sol marocain et la mise à la disposition des investisseurs d'une infrastructure géologique appropriée et fiable pour l'ensemble du territoire national.
La maturité du modèle marocain, par rapport à ceux de nombreux pays du continent, se matérialise par une stabilité au niveau réglementaire, avec séparation des rôles entre l'Etat et le secteur privé, une dynamique d'exploitation liée à une exploration active, la disponibilité d'une expertise nationale sur les volets régulation et technique, la transformation du potentiel et l'organisation en filières, la maitrise de la performance environnementale, du contenu local et de l'acceptabilité sociale. Les opérateurs miniers marocains sont très engagés dans le partenariat sud-sud conformément aux orientations éclairées de SM le Roi Mohammed VI. Ainsi, l'ONHYM assure le renforcement de capacités pour le personnel des institutions au niveau de treize pays, l'OCP SA soutient de manière intégrée l'agriculture africaine dans 16 pays. En plus de ces programmes, le modèle minier marocain pourrait servir, dans un processus de partage d'expertise mutuel, d'exemple pour une bonne identification des acteurs et partage des rôles entre Etat, fédérations, secteur privé et société civile; une meilleure organisation des chaines de valeurs; le renforcement des institutions de gouvernance sur le plan de la régulation et du suivi technique; le développement d'un capital humain minier national et la maitrise de la triple performance économique, sociale et environnementale, propre au concept de développement durable.
Les principaux produits miniers qui sont actuellement en cours d'exploitation sont: les phosphates, le charbon, le plomb, l'argent, l'or, le cuivre, le zinc, le cobalt, le manganèse, l'antimoine, le fer, la barytine, la fluorine, le sel, le gypse, les argiles, le mica, le talc… (ONHYM., 2014; Figure 4). Officiellement, on considère qu'environ 240 mines ont été exploitées au Maroc; ces chiffres sont en partie sous-évalués car une unité correspond à un district qui peut contenir plusieurs mines (situation fréquente dans les mines de phosphate). On retrouve des exploitations souterraines de petite taille produisant 100t/j jusqu'à des exploitations à ciel ouvert de taille significative produisant des milliers de tonnes de minerai par jour. La majorité des sites miniers sont fermés depuis plusieurs années (Hakkou et al. 2009). Figure 4: Les provinces métallogéniques au Maroc (ONHYM, 2017). 2. Réformes du secteur minier marocain La législation minière au Maroc est basée sur le Dahir (décret royal) du 16 avril 1951 qui ne comprend pas de dispositions obligeant un titulaire de titre minier à prendre les mesures nécessaires pour parer aux conséquences pouvant découler de son activité et susceptibles de mettre en cause la sécurité et la salubrité publique ou de porter atteinte aux caractéristiques essentielles du milieu environnant ou de compromettre la conservation de l'environnement (BABI, 2011).
Le Maroc possède à lui seul entre 70 à 75% (ou 50 milliards de tonnes) des réserves de phosphates mondiales. C'est le premier exportateur de phosphates mondial (34% du marché mondial) et le deuxième producteur (22% de la production mondiale). En 2019, le Maroc a produit 36 millions de tonnes de phosphates. Bien que la dépendance du pays à l'égard de ses exportations de phosphates se soit réduite ces dernières années, parallèlement à la reprise des exportations de produits manufacturés et agricoles, dopée par un secteur du tourisme florissant, les fluctuations des prix des phosphates sur le marché international peuvent toujours avoir de sérieuses répercussions sur l'économie du Maroc. L'exploitation des phosphates, qui remonte à 1921, est assurée en exclusivité par l'Office chérifien des phosphates (OCP), organisme national jouissant depuis sa création en 1920 d'un monopole d'État. La forme juridique originale dont il a été doté dès son origine confère à l'OCP les avantages d'une entreprise privée et ceux d'un organisme d'État, son fonctionnement étant en tous points analogue à celui d'une société anonyme qui aurait l'État comme seul actionnaire.
Auparavant, la licence n'était valable que pour quatre ans, ce changement est donc bienvenu pour les investisseurs. Par ailleurs, l'octroi d'une licence minière révoquera dorénavant le permis de recherche uniquement pour la superficie qu'il couvre. Un second permis de recherche sera nécessaire pour la superficie non couverte par cette même licence. Les droits miniers doivent être détenus par une entité juridique marocaine mais il est à noter qu'il n'y a aucune restriction pour les actionnaires étrangers. Transparence et environnement Les détenteurs de titres miniers doivent fournir auprès du gouvernement des informations sur leurs activités minières telles que des rapports géologiques, des statistiques minières, des programmes de travail, de budget et des informations sur les produits extraits. Le Code autorise les agents des ministères à effectuer des visites sur les sites afin de contrôler ces informations. Toutefois, des précisions supplémentaires quant à ces autorisations seront établies par les dispositions réglementaires à venir.