J'ai perdu l'équilibre, j'ai perdu sans raisons je me suis senti Libre, ouvert, enraciné, fécond J'ai touché Galatée, j'ai conquis les saisons Et j'ai continué encor, j'ai bâti des maisons Ce jour j'ai vu l'Impasse Ce jour j'ai vu la Fin Le début d'un beau sentiment d'Extase, La panacée d'Airain! J'ai palpé cette machine tiède J'ai parcouru ces courbes pleines de géométries complexes et tourments africains J'ai connu Damballa, la pure connaissance Mawu, Erzulie, Léwas Et suis rentré en trance J'ai vaincu le démon des nuits J'ai pleuré en cherchant l'Essor J'ai rencontré la Vie J'ai rencontré la Mort Retour à la case départ… Winson Perez, 2001
La mort d'un poète par Bernard Magnier «Ceux qui sont morts ne sont jamais partis Ils sont dans l'ombre qui s'éclaire et dans l'ombre qui s'épaissit, les morts ne sont pas sous la terre: ils sont dans l'arbre qui frémit, ils sont dans le bois qui gémit, dans l'eau qui coule, dans l'eau qui dort, dans la cave, ils sont dans la foule, les morts ne sont pas morts». Comment ne pas citer ces vers, parmi les plus célèbres du continent africain, alors même que leur auteur vient, à son tour, le 25 novembre dernier (à quelques jours de son quatre-vingt troisième anniversaire), de rejoindre le pays des ancêtres? Comme ce poème «(Souffles»), bien d'autres textes extraits de ses recueils de poèmes (Leurres et lueurs publiés en 1960 et dont certain s poèmes avaient été écrits en 1925) ou des contes (Contesd'Amadou Koumba publiés en 1947 dans la collection «Ecrivains d'Outremer» que dirigeait Léon Gontran Danias chez Fasquelle, puis Nouveaux Contes damadou Koumba en 1958, Contes et lavanes en 1963, enfin Contes daiva en 1977) ont fait le tour du monde et ont connu un succès qui ne s'est jamais démenti.
Les Morts ne sont pas sous la Terre L Écoute plus souvent Les choses que les êtres La voix du feu s'entend, Entends la voix de l'eau. Écoute dans le vent le buisson en sanglots: C'est le souffle des ancêtres. Ceux qui sont morts ne sont jamais partis: Ils sont dans l'ombre qui s'éclaire Et dans l'ombre qui s'épaissit. Poème africain sur la mort en photos. Les morts ne sont pas sous la Terre: Ils sont dans l'arbre qui frémit, Ils sont dans le bois qui gémit, Ils sont dans l'eau qui coule, Ils sont dans l'eau qui dort, Ils sont dans la case, ils sont dans la foule Les morts ne sont pas morts. Entends la voix de l'Eau. Écoute dans le vent Le buisson en sanglots: C'est le souffle des ancêtres morts, Qui ne sont pas partis Qui ne sont pas sous la terre Qui ne sont pas morts. Ils sont dans le sein de la femme, Ils sont dans l'enfant qui vagit Et dans le tison qui s'enflamme. Ils sont dans le feu qui s'éteint, Ils sont dans les herbes qui pleurent, Ils sont dans le rocher qui geint, Ils sont dans la forêt, ils sont dans la demeure, Le buisson en sanglots, Il redit chaque jour le pacte, Le grand pacte qui lie, Qui lie à la loi notre sort, Aux actes des Souffles plus forts Le sort de nos morts qui ne sont pas morts, Le lourd pacte qui nous lie à la vie.